Impressions, digressions
Il a encore fait très chaud aujourd’hui. Une chaleur moite et étouffante.
Et cette pré-canicule dure depuis quelques jours, déjà.
Mais il y’a deux bonnes heures, le ciel s’est assombri, est entré dans une colère orageuse, tonitruante… et à présent il pleure.
Que c’est bon de relâcher tant de pressions accumulées, n’est-ce pas, le Ciel ?
Oui, c’est ça, pleure. Ça fait du bien. Et à nous, sous tes paupières embuées, également.
Tu peux t’estimer heureux que je te réconforte de la sorte, le Ciel.
Moi, quand, petite, il m’arrivait de pleurer, j’avais souvent droit à « Pleure ! Tu pisseras moins ! »
Quand j’étais petite… Oui, enfin, il m’arrive encore de verser quelques larmes, même si je ne suis plus une enfant.Mais elles n’ont pas le même goût.
Gamine, elles n’étaient rien de plus que quelques chauds filets d’eau salée.
Aujourd’hui, lorsque je chiale, c’est plus rare, et plus retenu.
Et les raisons d’être de ces larmes ont changé.
Je pourrais passer trois heures à pleurer intérieurement, pour ensuite ne voir s’évader que quelques gouttelettes d’une bruine légère, mais bien trop amère ; alors que bambine, pour un caprice idiot de fillette, un tour de manège refusé ou un bras de poupée arraché, j’aurais versé de vrais torrents, des flots de déception et de tristesse puériles.
Mer calme à agitée. Drapeau rouge par endroits. Baignade autorisée, mais attention, non surveillée.
Tiens, ma métaphore ne tient plus la route. Il ne pleut plus. Depuis quelques minutes, j’entends à nouveau quelques oiseaux qui sifflent dans les branches mouillées des arbres .
Eh bien ! Quelle gaieté, par cette grisaille !
Enfin, moi aussi, ça me réjouit. La pluie me calme, m’apaise, me réconforte, et même si parfois le temps qui me menace parvient à chambouler mon état psychologique, il n’en est pas moins appréciable pour autant.
Je suis une fille de l’Eau.
Le bruit d’une mer déchaînée qui vient heurter de ses rouleaux le corps inerte mais solide des rochers … C’est à ça que je pense lorsque j’entends les échos urbains des jours pluvieux.
Des pneus de voiture qui écrasent une flaque d’eau en bas de chez moi. Alors que je suis coincée dans ma banlieue, me voilà transportée dans le Golfe du Morbihan.
C’est plutôt agréable comme illusion…
« Temps pourri sur Paris ? Chouette, j’adore la Bretagne ! »
Pause cigarette… Dehors.
Fumer. A l’abri du vent. Et sentir l’odeur, au-delà de celle que dégage mon tabac, du goudron bouillant tout juste soumis à une soudaine douche froide…
Le genre de parfums que la ville diffuse, entremêlés de carburants et autres agents de saveurs.
Et que tout citadin se doit d’apprécier. Autant que les ruraux savent se délecter des senteurs d’herbe fraîchement coupée, ou bien encore de foin tout juste retourné.
Et oui, la ville , elle aussi, propose ses arômes.
Il faut simplement apprendre à les connaître, les reconnaître, et les savourer du bout du nez.